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Reforme du seuil de revente à perte : 1,4 Milliard d’euros de pouvoir d’achat ponctionnés inutilement

Après avoir déjà, fin août, publiquement craint que les Etats Généraux de l’Alimentation soient un simple habillage pour une augmentation généralisée des prix, l’UFC-Que Choisir, tirant les conséquences de la difficulté d’être entendue dans le cadre des Ateliers et des réactions outrancières à toute réserve ou opposition, rend publique ce jour son étude d’impact alarmante de la bien étrange proposition de la FNSEA de modifier le seuil de revente à perte. Alors que la dernière réunion de l’Atelier sur les relations commerciales doit se tenir cet après-midi et en discuter, l’association dévoile, chiffres et bilan à l’appui, son constat accablant : si le bénéfice de cette proposition pour les producteurs est plus qu’incertain, l’impact pour les consommateurs sera lui immédiat et colossal !

En effet, les Etats Généraux de l’Alimentation discutent aujourd’hui même d’un éventuel relèvement du seuil de revente à perte, c’est-à-dire du prix en-dessous duquel un distributeur a l’interdiction de revendre un produit. Fortement soutenue par des organisations d’agriculteurs (à commencer par la FNSEA), de gros industriels et la majeure partie des distributeurs, cette proposition est avancée sans jamais se poser la question, pourtant centrale, de son impact inflationniste. Pourtant expérience passée et chiffres d’aujourd’hui ne laissent place à aucun doute.

Dès 2018, 1,4 milliard d’euros de ponction sur les consommateurs
Les promoteurs de la mesure peuvent tenter de noyer le poisson, il n’en reste pas moins que, par définition, augmenter le prix de vente minimal auquel il est permis de revendre un produit conduira… à une hausse des prix. Celle-ci concernera d’abord les produits de grande marque, qui servent de produit d’appel aux distributeurs et sont donc régulièrement vendus à marge faible. Un relèvement de 15 % du seuil de revente à perte (SRP), comme évoqué, se traduirait dès 2018, selon nos analyses, par une hausse des prix de 1,4 milliard d’euros, soit + 2,4 % sur les rayons concernés1. Loin d’être une vue de l’esprit, cet effet inflationniste ressort d’ailleurs des précédentes réformes, malicieusement passées sous silence… En effet, la dernière période de relèvement du SRP en France, sous la loi Galland (entre 1996 et 2006-2008), avait conduit à une inflation des produits alimentaires 8 points plus élevée en France que dans les autre pays d’Europe de l’Ouest.

Quel rapport entre le shampoing et les revenus agricoles ? 
21,5 % des dépenses des ménages en produits de grande consommation, touchés par cette proposition, sont sans lien avec la production agricole (produits d’entretien, d’hygiène-beauté, ou encore les eaux et sodas). A l’inverse, les produits agricoles non transformés (fruits et légume, viande, poisson), vendus à des niveaux de marge déjà élevés, ne seraient en rien concernés par la mesure. Bref, ce n’est pas en payant plus cher les cotons-tiges, eau minérales et mousses à raser que l’on va abonder le revenu des agriculteurs.

Des retombées économiques très hypothétiques pour les agriculteurs

Même dans le cas des produits transformés alimentaires, il est douteux que les agriculteurs bénéficient de cette inflation. Car obliger les distributeurs à vendre plus cher ne garantit en rien qu’ils achèteront plus cher à leurs fournisseurs ! L’expérience de la loi Galland est révélatrice : l’inflation était d’abord venue nourrir les marges de la grande distribution, qui avaient augmenté de près de 54 % entre 1996 et 2002.

Et même dans l’hypothèse où les distributeurs achèteraient plus cher leurs produits aux industriels, les agriculteurs seraient encore loin du compte. Il faudrait alors compter sur la bonne volonté des gros industriels de l’agroalimentaire pour augmenter d’eux-mêmes leurs prix d’achat des matières premières agricoles (qui ne sont d’ailleurs pas toujours françaises). Le fantasme de la percolation jusqu’aux agriculteurs, agitée par certains, repose donc sur un double pari, pour ne pas dire une double naïveté : que les distributeurs d’abord, les gros industriels ensuite, acceptent sans que rien ne les y contraigne à diminuer leurs profits pour augmenter le revenu agricole. Aujourd’hui, les seuls gagnants assurés de la réforme sont les industriels et la distribution.

A s’arc-bouter sur les veilles recettes qui n’ont pas fait leur preuve, il ne faudrait pas rater une occasion d’avancer vers de nouveaux modèles réellement créateurs de valeur pour tous.

Décidée à ce que les voix dissonantes puissent enfin être entendues, l’UFC-Que Choisir demande donc aujourd’hui publiquement au Président de la République qui doit s’exprimer dans les prochains jours, de ne pas avancer aveuglement sur une proposition à l’impact négatif certain pour les consommateurs et aux bénéfices plus qu’hypothétiques pour les producteurs agricoles.

Retrouvez cet article et l’analyse complète et méthodologie disponibles dans la note jointe sur quechoisir.org

Action UFC-Que Choisir publiée le 29/09/2017

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