Plus de 9 prix barrés sur 10 sont des promotions trompeuses
La directive « Omnibus » impose depuis un an que l’affichage d’une réduction de prix se fasse sur la base du prix le plus bas pratiqué par le vendeur dans le mois précédent l’entrée en vigueur de la promotion. L’analyse par l’UFC-Que Choisir d’un échantillon de 6 586 annonces portant un prix barré, publiées sur les principaux sites de commerce en ligne (1), montre que seulement 3,4 % d’entre elles correspondent à de véritables promotions opérées par les vendeurs, conformément à la directive « Omnibus ».
En effet, les professionnels n’ont pas tardé à inventer de nouvelles stratégies pour contourner la réglementation : dans la quasi-totalité de notre échantillon (96,6 %), ils affichent des promotions reposant non pas sur des réductions de prix sur les 30 derniers jours, mais sur le concept de prix dit de « comparaison ». Dans ce cas, ils choisissent librement un prix de référence avec lequel comparer leur produit, de manière à présenter leur offre comme une affaire à ne pas manquer. Les allégations recensées (« Prix de vente conseillé », « À l’origine », « Ancien prix », « Prix moyen sur la marketplace », « Prix moyen sur les sites concurrents », « Prix renseigné par le vendeur », etc.) sont aussi multiples qu’inintelligibles.
Un affichage de prix barrés visant à entretenir la confusion
Les commerçants ne s’en tiennent pas uniquement à l’utilisation de toutes ces dénominations. Ils mettent également tout en œuvre pour reproduire le format visuel d’une promotion, afin d’entretenir la confusion des consommateurs. En effet, on constate qu’il est très difficile de faire la différence entre une annonce de réduction de prix conforme à la réglementation, et une annonce qui ne l’est pas. Non seulement les premières sont mélangées aux secondes, mais elles adoptent toutes exactement la même présentation, que ce soit en termes de contenu ou de format (taille, couleur, police, etc.). Quelle que soit la nature du prix de référence, celui-ci est toujours affiché à côté du prix effectif, le plus souvent barré et accompagné d’une mention en tout petits caractères.
La grande similarité de ces annonces induit les consommateurs en erreur, en les amenant à considérer ces prix barrés comme des réductions de prix conformément à la réglementation, et non comme une simple comparaison. Elle révèle donc clairement une pratique commerciale trompeuse, dont le commerçant se rend coupable.
Plus le prix de référence est opaque, plus la réduction proposée est gonflée
Au-delà de la prolifération de ces prix de comparaison, la méthode même de calcul, qui n’est pas encadrée par la loi, est particulièrement problématique. Quand bien même l’internaute tenterait de comprendre ce qui se cache derrière ce prix affiché, sa définition est souvent enfouie dans les conditions générales de vente ou tout simplement inexistante. Lorsque celle-ci est disponible, elle est fréquemment basée sur des données exclusivement détenues par le commerçant, ce qui empêche les consommateurs de s’assurer de la réalité des prix de comparaison affichés.
Dans les cas où elle peut être vérifiée, le vendeur manipule même parfois le prix de comparaison, en choisissant sciemment celui qui permet d’afficher la plus forte ristourne ! En effet, plus la réduction du prix proposée est importante, plus le prix de référence affiché est opaque ou arbitraire. L’analyse de l’UFC-Que Choisir démontre que pour les véritables promotions conformes à la réglementation « Omnibus », la réduction moyenne est de 6,0 %. En revanche, elle atteint le montant improbable de 26,5 % pour les références non réglementées, ce qui souligne qu’il s’agit bien d’un déplorable stratagème pour pousser les consommateurs à l’achat en leur faisant croire qu’il s’agit d’une bonne affaire.
Déterminée à stopper ces mauvaises pratiques, l’UFC-Que Choisir dépose plainte pour pratiques commerciales trompeuses à l’encontre de Amazon, ASOS, Cdiscount, E.Leclerc, La Redoute, Rue du Commerce, Veepee, et Zalando auprès du Procureur de la République de Paris.
Parallèlement, l’association saisit la Commission européenne pour l’alerter sur les dérives des professionnels, et lui demander d’agir afin d’interdire strictement tout autre système de prix de référence que celui prévu par la directive « Omnibus ».
UFC-Que Choisir
(1) L’association a analysé les pratiques des principaux vendeurs en ligne présents sur le marché français, selon les classements de la Fevad et de Similarweb. Des pratiques douteuses ont été constatées sur les sites de 8 vendeurs pratiquant des prix de comparaison : Amazon, ASOS, Cdiscount, E.Leclerc, La Redoute, Rue du Commerce, Veepee, et Zalando. Par conséquent, 13 096 offres de ces vendeurs, dont 6 586 annonces avec un prix de référence, ont été analysées en détail.