UFC-QUE CHOISIR DE LA SARTHE

Immobilier / Logement, Location

Etre locataire d’un logement vide

Les obligations du bailleur et du locataire pendant la durée de la location d’un logement vide.

Tout au long de l’occupation des lieux, les parties ont des obligations : le bailleur doit faire toutes les réparations autres que locatives nécessaires au maintien en état du logement (art. 6c de la loi du 6 juillet 1989), et doit assurer la jouissance paisible du logement au locataire. Le locataire doit payer le loyer et les charges ainsi que faire les réparations locatives.

A – Les charges et réparations locatives

1) Les charges
Le locataire doit participer aux charges récupérables. La liste de ces charges est fixée par le décret du 26 août 1987, no 87-713 (pour voir la liste). Aucune charge non listée dans l’annexe du décret ou ne correspondant pas à un service réellement rendu au locataire ne peut être exigée de lui (art. 23 de la loi du 6 juillet 1989).

Est-ce que le bailleur (propriétaire) peut décider de prévoir dans le contrat un forfait de charges ?
Non. Il est interdit de prévoir un tel forfait, car il ne correspond pas aux exigences de la loi, qui imposent que les charges demandées correspondent à un réel service (Cass. 3e civ., 20 décembre 1995).

Est-ce que le bailleur peut prévoir une provision sur charges ?
Oui, dans la mesure où la loi prévoit cette possibilité, mais sous la condition qu’il y ait une régularisation de charges annuelle.

Est-ce qu’à défaut de régularisation de charges, le locataire peut suspendre le paiement des provisions ?
Ce n’est pas conseillé. Il est toujours lié par le contrat et doit s’exécuter, la provision étant prévue dans le contrat. En revanche, il peut sommer le bailleur d’effectuer cette régularisation (si la mise en demeure envisagée plus haut n’a pas abouti) soit par le biais du référé devant le tribunal d’instance, soit par le biais de la procédure en injonction de faire, toujours devant le tribunal d’instance. De plus, le locataire peut assigner le bailleur au fond (devant le tribunal d’instance, mais par le biais d’un huissier) pour demander une diminution de la provision (Civ. 3e, 18 juin 2002, no 01-01856).

Est-ce que le bailleur peut réclamer un arriéré de charges au titre de la régularisation alors qu’aucun justificatif n’a été fourni ?
Non. Toute demande d’arriéré de charges au titre d’une régularisation doit faire l’objet d’une justification, à défaut il ne pourra pas être exigé (Cass. civ. du 8 décembre 2010, no 09-71124). En effet, si le bailleur ne lui tient pas ces pièces à disposition (le bailleur n’a pas à les communiquer), le locataire est en droit de refuser le paiement du surplus de charges réclamé.
Attention : le locataire doit faire la demande de fournir des justificatifs dans un délai d’un mois qui suit l’envoi du décompte (la demande d’arriérés de charges), sans quoi il ne pourra plus se prévaloir du défaut de justificatifs pour refuser le paiement.

2) Les réparations locatives

Le locataire doit prendre en charge les réparations locatives et uniquement ce type de réparations (elles résultent de l’usage normal, à la différence des dégradations qui résultent de l’usage anormal des lieux).
Ces réparations sont listées par l’annexe du décret du 26 août 1987, no 87-712 (pour voir la liste). Si la réparation n’est pas dans la liste de ce décret il faudra, pour s’assurer qu’elle n’est pas à la charge du locataire, vérifier le montant du devis de réparation (plus il est important, moins c’est au locataire de payer), car il n’est tenu que des petites réparations (art. 1er du décret). Toutes les réparations autres que locatives sont à effectuer par le bailleur (art. 6c de la loi du 6 juillet 1989), sauf à ce qu’elles résultent d’un usage anormal (voir « Les dégradations », ci-dessous).
Attention : le locataire n’est pas tenu de prendre en charge ces réparations locatives si elles sont occasionnées par la vétusté*, un vice de construction, une malfaçon ou un cas de force majeur. En effet, la vétusté permet de s’exonérer de ces réparations locatives. Pour savoir quels sont les abattements de vétusté (vous trouverez ci-après un exemple qui n’a de force obligatoire que s’il est annexé au contrat) : voir grille de vétusté.

À titre d’exemple, la réparation des volets roulants incombe-t-elle au locataire ou au propriétaire ?
Dès lors que la dégradation du volet roulant n’est pas due à une faute du locataire (mauvaise utilisation ou défaut d’entretien), les travaux nécessaires à la reprise des désordres (remplacement total des lames et de nouvelles coulisses) ne sont pas à la charge du locataire (cour d’appel de Paris, 21 mars 1997).

… le remplacement d’un robinet ?
Ce n’est pas une réparation locative (Rép. min. no 15538 Q, JOAN 22 août 1994), toujours sous réserve que le locataire n’ait pas commis de faute. En revanche, la réparation d’une fuite d’eau, du fait d’un défaut d’étanchéité du joint, serait à la charge du locataire, car le remplacement des joints est une petite réparation. L’obligation du locataire ne saurait aller au-delà du remplacement des petites pièces : joints, clapets (annexe, chap. IV du décret du 26 août 1987 no 87-712)…

Est-ce que je suis tenu responsable des détériorations qui ont lieu après treize années d’occupation, alors que le bailleur n’a pas fait de travaux de conservation tout au long de la durée de mon bail ?
Dès lors que le locataire restitue les lieux à l’état d’usage (aucun défaut d’entretien, pas de dégradation anormale résultant des états des lieux) après un certain nombre d’années (à partir de dix ans d’occupation environ) et que le bailleur n’a pas fait de travaux tout au long de la durée d’occupation, il ne sera pas présumé responsable des détériorations constatées (c’est-à-dire qu’il n’aura pas besoin de prouver la vétusté, c’est au bailleur de prouver le défaut d’entretien du locataire s’il veut lui imputer le coût de la réparation) [Cass. 3e civ., 13 octobre 2009, no 08-17849].

Est-ce que, si je fais une réparation qui est normalement à la charge du bailleur, je peux lui demander le remboursement ?
Non. Le locataire ne doit surtout pas faire les réparations qui normalement incombent au propriétaire dès lors qu’il n’a pas eu son accord exprès, ou à défaut une autorisation en justice. Si le propriétaire ne répond pas aux LRAR du locataire pour demander cette prise en charge, il faudra saisir le juge (art. 1144 C. civ.).

B – Le loyer et la quittance

1) Le loyer

Une fois qu’il est fixé dans le contrat, le locataire est tenu de le payer à échéance, ou d’avance si le contrat le précise.
Mais le loyer peut évoluer dans deux cas seulement. Le premier est l’augmentation, s’il est manifestement sous-évalué par rapport au voisinage, ou s’il est prévu une clause d’indexation (c’est-à-dire une clause qui fait varier le loyer en fonction de l’indice de référence des loyers IRL).

Comment calculer l’indexation du loyer ?
Pour faire jouer la clause d’indexation, il faut un indice de référence (indice du 1er trimestre, 2e trimestre…). S’il n’est pas prévu clairement dans le contrat, alors on appliquera le dernier indice publié au jour de la signature du contrat (art. 17 de la loi du 6 juillet 1989).
Le calcul sera effectué sur la méthodologie suivante : Loyer × (Indice de référence de l’année en cours/Indice de référence de l’année précédente) = Nouveau loyer.
Pour consulter l’évolution de l’IRL : http ://www.insee.fr/fr/themes/conjoncture/indice_loyer.asp

Est-ce que, en cas de baisse de l’indice, le locataire peut exiger de son bailleur une diminution du loyer ?
Oui, mais à plusieurs conditions :
– l’indexation sur l’IRL doit être inscrite dans le bail ;
– le bail doit mentionner la « révision » ou « l’indexation » du loyer selon l’IRL. S’il parle « d’augmentation en fonction de l’IRL », ou de « révision à la hausse selon l’IRL », aucune baisse ne pourra être appliquée ;
– enfin, le locataire doit demander la révision. Selon la loi, « l’indexation intervient à la date convenue entre les deux parties ». À partir du moment où soit le locataire, soit le propriétaire bailleur en fait la demande, l’indexation est obligatoire. Si tel n’est pas le cas, le loyer ne change pas. En revanche, si une clause prévoit que l’initiative de la révision appartient au seul bailleur, alors, reste le problème de savoir si une telle clause est licite.

Est-ce que l’acquéreur d’un logement loué (le nouveau bailleur) peut procéder à l’indexation rétroactive des loyers et en exiger le paiement au locataire ?
Oui, si le bailleur n’a pas procédé à l’indexation pendant le bail, il peut revenir cinq ans en arrière pour l’indexation (art. 2224, C. civ.).
Mais le nouveau bailleur n’aura que le droit de réclamer les loyers échus depuis qu’il est propriétaire du bien (cour d’appel de Paris, 6e ch., sect. B, 10 avril 1986).

Dans quel cas puis-je décider de suspendre mon loyer ?
Les seuls cas où les juges ont considéré que la suspension de loyer était possible sont ceux où les lieux loués étaient devenus inhabitables (cour d’appel de Nîmes, 3 mai 2001, ou cour d’appel de Colmar, 16 juin 2008) [exemple : les plafonds du logement présentaient des traces d’infiltrations, les murs étaient fissurés en divers endroits, la fosse septique était apparente et fissurée, à tel point qu’elle suintait et entraînait une odeur nauséabonde ; enfin la chaudière à charbon était en mauvais état et se trouvait également fissurée] (exemple : victime d’un dégât des eaux rendant les lieux inhabitables). De plus, avant toute suspension, il faut que le locataire ait mis en demeure le bailleur de faire les travaux de réfection.
Attention : Il n’est pas conseillé de décider de suspendre les loyers sans l’accord du juge, car tant que ce dernier ne s’est pas prononcé, on ignore si l’état du logement justifie cette suspension.

Hors cas de l’indexation, dans quelle mesure le bailleur peut-il augmenter mon loyer ?
Il peut le faire si le loyer actuel est manifestement sous-évalué par rapport aux loyers pratiqués dans le voisinage pour des logements comparables (art. 17 de la loi du 6 juillet 1989). Mais sous les conditions cumulatives suivantes (art. 18 de la loi du 6 juillet 1989) :
– le bailleur doit fournir au moins six références pour les communes de plus de un million d’habitants, trois références minimum pour les autres communes ;
– 2/3 des références doivent porter sur des logements qui n’ont pas subi de changement de locataire depuis au moins trois ans ;
– les références doivent comporter le nom de la rue le numéro, le montant du loyer, la superficie réelle, les équipements collectifs présents… ;
– il ne peut l’augmenter qu’à l’issue d’une période de trois ans (ou six ans si c’est une personne morale).
Attention : si l’augmentation qui en résulte est supérieure de plus de 10 % du loyer initial, alors le bailleur devra étaler l’augmentation sur une durée de trois ans (1/3 par an), ou sur six ans si c’est une personne morale. Si l’augmentation est de plus de 10 %, alors elle devra être étalée sur six ans quel que soit le type de bailleur.
De plus, si aucun accord amiable n’est trouvé pour une telle augmentation, le locataire peut soit saisir directement le juge d’instance, soit saisir la Commission départementale de conciliation sur le logement. Si toujours aucun accord n’est trouvé dans le cadre de la conciliation, le locataire pourra saisir le juge afin que ce dernier fixe le montant du nouveau loyer.

2) La quittance
Chaque fois que le locataire s’est acquitté de son loyer, le bailleur est tenu, si le locataire en fait la demande, de lui délivrer une quittance pour le loyer payé. En revanche, si le locataire ne l’a pas payé intégralement, le bailleur doit lui adresser un reçu (art. 21 de la loi du 6 juillet 1989).

Est-ce que le bailleur peut me faire payer une somme pour l’envoi et/ou l’établissement de la quittance ?
Non. La remise de la quittance doit se faire gratuitement, que ce soit pour l’envoi ou l’établissement, aucun frais ne doit être facturé au locataire au titre de cette obligation (art. 21 de la loi du 6 juillet 1989).

C – Les transformations et aménagements

Si le locataire a le droit de faire tous les aménagements qu’il souhaite dans les lieux loués, il ne peut pas transformer le logement. En effet, le locataire peut, sans autorisation du bailleur, aménager librement les pièces du logement loué, notamment en modifiant leur usage (art. 6d et 7f de la loi du 6 juillet 1989).

1) Les aménagements :

Ce sont les travaux qui se limitent à permettre une utilisation des lieux loués ou qui ne portent pas atteinte au gros œuvre. Dans ce cas, le locataire ne sera pas tenu de remettre les lieux en l’état (enlever les aménagements) après son départ.

Est-ce que je peux mettre une baignoire à la place de la douche préexistante dans la salle de bains de mon logement ?
Oui. Mais il faut pour cela que ce soit fait par un professionnel (il faut que les travaux soient conformes aux règles de l’art) et que l’installation ne porte pas atteinte au gros œuvre (baignoire non scellée) [cour d’appel de Rouen, 1re ch., 27 octobre 1999, Jurisdata no 1999-10395).

Est-ce que je peux changer la couleur des peintures dans mon logement ?
Oui. Le locataire peut mettre les couleurs qu’il souhaite et ne sera pas tenu de la remise en état à la fin du bail, sauf à ce qu’elles soient si excentriques qu’elles empêchent une habitabilité normale (exemple : le rouge vif n’empêche pas cette habitabilité) [cour d’appel de Paris, 20 septembre 2005].

2) Les transformations

Ouverture dans un mur de plus de 2 mètres de large, transformation de la cuisine en lingerie et de la chambre en cuisine aménagée…

Quelles sanctions encourt le locataire en cas de transformation sans autorisation ?
Le locataire ne peut être tenu à la remise immédiate des lieux loués que si ces transformations portent atteinte à la sécurité du logement et de ses équipements (malfaçons pouvant porter atteinte à la solidité de l’immeuble ou risque de créer des dégâts des eaux…). En revanche, si aucun risque n’est décelable, la remise en état ne peut avoir lieu, si le bailleur le souhaite, qu’à la fin du bail. Mais le bailleur pourrait décider de procéder à la résiliation judiciaire du bail (Civ. 3e, 31 octobre 2006, no 05-10553) pour des transformations qui ont été faites par le locataire sans autorisation, quand bien même ces transformations ne sont pas dangereuses pour la sécurité du logement ou de ses équipements.

D – La jouissance paisible du logement

Le bailleur est tenu d’assurer la jouissance paisible du logement : cette obligation rejoint l’obligation du bailleur de procéder aux réparations tout au long du bail, dès lors qu’elles ne sont pas de nature locative, mais son champ est beaucoup plus large, car elle porte aussi sur les éléments troublant la jouissance et qui trouvent leur origine dans les parties communes (dans le cas où la location est sise dans une copropriété).

L’ascenseur de la copropriété est en panne depuis longtemps et le bailleur ne fait rien. N’en est-il pas responsable ?
Si, il manque dans ce cas à son obligation de jouissance paisible (art. 6b de la loi du 6 juillet 1989) si le locataire habite à un étage élevé et que, malgré des relances auprès du bailleur, ce dernier n’a effectué aucune démarche auprès du syndicat de copropriétaires pour tenter d’y remédier (cour d’appel de Paris, 20 mai 1999).

Dans mon immeuble, il y a beaucoup de bruit du fait des voisins, est-ce que je peux demander à mon bailleur de faire cesser ces troubles ?
Le bailleur ne répond pas des nuisances sonores occasionnées par les voisins dès lors que ces voisins ne sont ni les locataires ni les préposés (entrepreneur, gardiens..) du bailleur (Cass. 3e civ., 15 octobre 2008, no 07-13971). Si le locataire est dans une copropriété et que le bruit vient d’un autre copropriétaire, le bailleur ne sera pas tenu responsable des bruits que ce copropriétaire occasionne. Si le locataire est dans une maison individuelle et que l’auteur du trouble est le voisin de la maison louée, le bailleur ne sera pas non plus responsable. Dans ce cas, il faut agir à l’encontre de l’auteur des nuisances sonores sur le fondement du trouble anormal de voisinage (article 544 C. civ.).
Attention : le bailleur n’est responsable des troubles causées par des tiers (étrangers au bailleur) que si ils portent une atteinte matérielle à la chose louée (ascenseur, fissures dans les murs provoquées par des travaux effectués par des tiers) [Cass. civ., 25 février 2004, no 02-10085]. En effet, dans ce cas, le bailleur est tenu d’accomplir toutes les diligences nécessaires pour satisfaire à la demande en cessation de trouble subi par le locataire, dans le cas où le trouble résulte des parties communes (Civ. 3e, 13 novembre 2002). Mais ce n’est que le défaut de diligence qui est sanctionné, pas le trouble dans les parties communes, donc s’il est intéressant, parallèlement, de mettre en demeure le bailleur de les accomplir, il faut envisager également de mettre directement en cause le syndicat de copropriétaires ou l’auteur du trouble (art. 544 C. civ.) afin d’obtenir la cessation du trouble ainsi qu’une indemnisation pour le préjudice subi.

E – Sous-location, prêt et hébergement

La sous-location et la cession de bail sont formellement interdites par l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989.

– L’hébergement : Cass. 3e civ., 22 mars 2006, no 04-19349 : « les clauses d’un bail d’habitation ne peuvent avoir pour effet de priver le preneur de la possibilité d’héberger ses proches ». Lorsqu’il s’agit de proches (famille, concubin notoire…), il peut les héberger même pour une longue durée. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une personne plus éloignée (ami, par exemple), il faut que l’hébergement soit temporaire, sans quoi l’accord du bailleur peut être nécessaire.

– Le prêt du logement : il faut distinguer selon qu’une clause du contrat de bail l’interdit ou pas.
– Si une clause interdit le prêt : cette clause est licite (Cass. 3e civ., 10 mars 2010, no 09-10412), le locataire ne pouvant dans ce cas pas prêter son logement.
– Si aucune clause n’interdit le prêt : il faut que le logement prêté continue de rester l’habitation principale du locataire prêteur, car les juges sanctionnent l’abandon définitif de la jouissance des lieux au visa de l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 (car ce serait considéré comme de la sous-location ou de la cession de bail). Le prêt doit donc être temporaire.

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